MORSURES SUR MESURE (Partie 1)
MORSURES SUR MESURE (Partie 1)

MORSURES SUR MESURE (Partie 1)

Les traces de morsures sont-elles fiables ?

Les dents ne sont pas comme les empreintes digitales : elles ne sont pas uniques dès la naissance. Lorsque les dents poussent, à raison de 4 micromètres par jour, elles percent la gencive. Cette phase, appelée éruption, est différente pour chaque individu. Si les traces de morsure ont pu faire condamner des criminels, peuvent-elles faire condamner des innocents ?

 Un départ en fanfare

Ted BUNDY à son procès

L’affaire criminelle qui a braqué les projecteurs sur l’odontologie légale est celle de Ted BUNDY. Tueur en série charismatique, voire « charmant », traits dont il se servait pour attirer ses victimes, Ted BUNDY assassinera plus de 30 jeunes femmes, en décapitera au moins 12, et sera arrêté le 31 juillet 1978.

C’est le Docteur SOUVRION, odontologiste légal du bureau du légiste du Comté de Miami Dade, qui le fera condamner. BUNDY avait laissé des traces de morsures sur les fesses d’une de ses victimes.

Dr Souvrion : Odontologiste témoignant au procès de Ted BUNDY

A la question posée par le procureur :

Pouvez-vous me dire avec un degré de certitude raisonnable si ce sont ces dents qui ont produit ces traces ?

SOUVRION répondra en faisant référence au moulage des dents de BUNDY :

Oui , Monsieur . Ce sont ces dents qui ont produit ces traces.

La défense fera alors intervenir un orthodontiste du Maryland qui remettra en cause l’assertion de l’accusation, attestant de l’unicité de la denture de BUNDY.

Il témoignera alors :

La denture de BUNDY est celle que je m’attends à retrouver dans 20% de la population d’hommes de race caucasienne.

En dépit de cette réserve, BUNDY sera condamné. L’analyse de la morsure restera la pierre angulaire de l’accusation. Cette condamnation apportera une crédibilité et une légitimité à cette science naissante : l’analyse de morsures par l’odontologie légale.

 

Les Morsures : une analyse et une classification scientifiques

On distingue plusieurs types de morsures :

  •  Classe 1 : morsure avec érythème
Morsure avec contusion
  •  Classe 2 : morsure avec contusion
Morsure avec abrasion
  •  Classe 3 : morsure avec abrasion
Morsure avec lacération
  •  Classe 4 : morsure avec lacération
Morsure avec avulsion tissulaire
  • Classe 5 : morsure avec avulsion tissulaire

Les lésions associées aux morsures sont également précisément définies et classifiées :

  1.  Erythème : rougeur causée par la dilatation des capillaires
  2.  Contusion : rupture des vaisseaux sans déchirure de la peau
  3. Abrasion : blessure mineure caractérisée par la séparation ou l’excision de fragments superficiels de la peau
  4.  Lacération : déchirure forcée des tissus cutanés
  5.  Avulsion : amputation cellulaire

Malgré une telle précision dans le recensement des types de morsures, leur analyse n’est pas aisée. Il faut ajouter la prise ne considération de 4 facteurs variables :

  •  Les dents du mordeur
  •  L’action de la langue, des lèvres et des joues du mordeur
  • L’état psychique du mordeur

Par exemple, le sadique laisse une marque très définie car il mord lentement et intentionnellement. Quant au lunatique, il mord avec empressement et sans but précis.

Une victime qui se défend laisse des marques de natures très différentes (en cas de strangulation, sur les mains de l’agresseur)

  •  La ou les localisations de la ou des morsures.

Il est plutôt rare de trouver des marques distinctes des dents de la mâchoire supérieure et de la mâchoire inférieure, surtout sur une victime encore vivante lorsque mordue, car le mouvement de cette dernière implique une forte distorsion de ces marques. D’une façon générale, l’une des deux est prépondérante. En effet, une trace de morsure résultant d’un mouvement de fermeture des mâchoires, il s’agit là d’une dynamique difficile à appréhender, susceptible d’entraîner des distorsions au niveau de la trace.

Le facteur temps est primordial. L’aspect d’une morsure évolue avec le temps écoulé. Dans le cas d’une victime retrouvée décédée, la peau se rétracte au fur et à mesure de la décomposition, ce qui provoque une déformation de la trace laissée.

L’hématome apparaît quelques heures suivant la morsure, puis disparaît après 36 heures (pour les morsures de Classes 1 et 2).

L’odontologiste devra attendre la fin de la lividité cadavérique pour que les détails d’une morsure soient bien distincts.

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