Whitman n’est pas un cas isolé
L’intuition de Whitman à son égard était juste : son cerveau avait « changé ». Les histoires comme celles de Whitman se produisent de plus en plus fréquemment. La technologie d’exploration du cerveau s’améliore, et par conséquent, nous détectons plus de problèmes que nous pouvons lier de plus en plus facilement à des comportements aberrants.
Prenons l’exemple d’un homme d’une quarantaine d’années, que nous appellerons Alex, qui a vu ses préférence sexuelles se transformer subitement. Il a commencé à s’intéresser à la pornographie enfantine ; son soudain intérêt s’est mué en véritable obsession. Il passait son temps à surfer sur des sites internet spécialisés, et à acheter des revues de pornographie enfantine. Il avait recours fréquemment à des prostituées . Il déclarera plus tard qu’il voulait s’arrêter mais que dominé par le principe de plaisir, ses efforts étaient anéantis. Il faisait de son mieux pour cacher ses préférences, mais des avances à sa pré-adolescente de belle fille alerta sa femme, qui trouva sa collection pornographique. Déclaré coupable d’abus sur enfant. La veille de son jugement, Alex commença à se plaindre de maux de tête de plus en plus violents. Il fut amené aux urgences. Un scanner révéla une tumeur massive dans le cortex orbitofrontal. Des neurochirurgiens enlevèrent la tumeur. Son appétit sexuel redevint normal.
Un an après cette opération, son comportement pédophile refit surface. Le neuroradiologue constata qu’une petite partie de la tumeur n’avait pas été enlevée, et avait commencé à grossir. Après cette ultime opération, le comportement d’Alex redevint normal.
Le Docteur Serge Stolaru, dirigeant dirige un groupe de recherche au sein de l’Unité Inserm 669 (Paris), ayant pour objet l’interface entre les phénomènes mentaux et leurs soubassements cérébraux, précise:
« ce n’est pas la première fois que les altérations frontales sont associées à la libération du comportement sexuel ».
Cela ne signifie pas que tous les pédophiles doivent subir une IRM prévient Jeffrey Burns, Neurologue et maître de
conférence au Centre Médical de l’Université du Kansas :
« La plupart des pédophiles développe des problèmes tôt dans leur vie »
alors que le patient en question avait une vie normale avant que ce problème ne surgisse.
Ce que vous prenez pour acquis ne l’est pas
Quand des changements biologiques interviennent, vos décisions, vos préférences, vos désirs changent. Les instincts que vous prenez pour acquis, (Je suis agressif/non agressif, Je suis attiré par les enfants/les adultes, Je suis hétérosexuel/homosexuel, …) dépendent de certains détails du mécanisme neural. Penser qu’agir selon ces préférences est du fait d’un libre choix n’est qu’une hypothèse quelque peu hâtive.
La démence fronto-temporale est un puissant désinhibiteur
La soudaine pédophilie d’Alex démontre que des instincts, des désirs indétectables se cachent derrière les rouages de notre cerveau. Lorsque le lobe frontal est atteint, les gens sont désinhibés et agissent d’une façon surprenante. La désinhibition est un symptôme associé à la démence fronto-temporale, une maladie qui cause la dégénérescence des lobes frontal et temporal. Au grand dam des proches, ces patients violent les règles sociales de toutes les façons : ils volent sous le nez des agents de sécurité, ils se déshabillent en public, se mettent à chanter à des moments inappropriés, brûlent les signes STOP, mangent des restes sortis de poubelles publiques, ils sont agressifs et sexuellement transgressifs. Les patients souffrant de démence fronto-temporale finissent souvent devant le juge, et leurs avocats, leurs médecins ont le plus grand mal à expliquer que les violations commises ne sont pas entièrement de leurs faits. La plus grande partie de leur cerveau s’est délité, et la médecine moderne n’a aucun remède. 57% des patients souffrant de ce type de démence violent les règles sociales contre seulement 27% des patients souffrant de la maladie d’Alzheimer.
La chimie du cerveau : un équilibre instable
Un changement, même minimes dans la chimie du cerveau peut avoir des conséquences inattendues en affectant le comportement. Certaines victimes de la maladie de Parkinson se sont vues transformées en joueurs invétérés, lorsque soumis au médicament appelé pramipexole. Il ne s’agit pas de simples joueurs occasionnels mais de joueurs pathologiques : des personnes qui n’avaient jamais véritablement joué, et qui s’envolaient pour Las Vegas. D’autres joueront en ligne, accumulant des dettes qu’ils ne peuvent rembourser. Pour d’autres, cela s’accompagnera de troubles alimentaires (ils deviendront des mangeurs compulsifs), ou deviendront alcooliques, ou encore verront leur libido exploser. Dans ce cas, la solution est simple, il suffit de diminuer les doses de pramipexole, et tous ces troubles disparaîtront.
La découverte de la tumeur de Charles WHITMAN aurait-elle changé votre perception des meurtres qu’il a commis ? S’il avait survécu, quelle sentence auriez-vous trouvé adaptée ? En existe-il une aujourd’hui ?