Story Highlights
- Les traces de sang doivent être envisagées non pas dans leur ensemble mais comme une combinaison d’éléments observables et mesurables.
- 8 étudiants en sciences forensiques apportent un regard neuf sur la terminologie existante.
- La classification préliminaire de l’Atlas donne naissance à une aide visuelle appelée « Atlas des Eléments ».
- Ce n’est qu’à cette étape que les principes de dynamique des fluides sont pris en compte.
- 86% des traces ont été correctement répertoriées et classées.
- L’automatisation de la reconnaissance des traces de sang pourrait alors être envisagée, à l’instar des analyses balistiques, ou encore des analyses de marques d’outils.
Une nouvelle méthode de morpho-analyse, basée sur les éléments qui composent une trace de sang, est l’objet d’une étude réalisée en Nouvelle Zélande, et pourrait donner naissance à un Atlas universel.
Une classification nécessaire
La morpho-analyse des traces de sang souffre d’un manque de classification mais aussi d’une méthodologie universellement adoptée. Certaines interprétations restent ambigües.
La classification des structures de traces de sang est au cœur de cette discipline. L’évaluation et l’identification des caractéristiques d’une trace de sang se doivent d’être objectives et répondre à des critères d’indexation mesurables.
A ce jour, aucune méthode ne peut prétendre avoir été universellement adoptée. Ce manque d’unanimité provient notamment de la méthode utilisée qui repose sur une description de la structure de la trace en fonction des mécanismes de dépôt, et non sur les caractéristiques observables du motif. Ainsi, les conclusions d’expertises sont basées sur la cause de la structure observée et non sur l’analyse complète des particularités du motif formé.

De plus, il semble évident que certaines types de traces sont difficiles à distinguer si l’on n’isole pas les différentes caractéristiques clés. Les traces de sang dues à une expiration sous l’effet d’une blessure à la bouche ou aux voies respiratoires ont les mêmes caractéristiques qu’une absence de vacuoles suite à certaines projections par impact.
Toute ambiguïté peut mener à des conclusions erronées et contradictoires. De plus, une étude récente a démontré que la classification peut être faussée par les informations contextuelles.
Afin d’établir cette nouvelle nomenclature, l’étude néo-zélandaise se propose de revenir à des principes fondamentaux. Les traces de sang doivent être envisagées non pas dans leur ensemble mais comme une combinaison d’éléments observables et mesurables.
La trace de sang décomposée
La forme de la tâche de sang est alors considérée comme un ensemble d’éléments observés individuellement. Chacun de ces éléments est classé selon ses dimensions, et ses caractéristiques visuelles. Une terminologie simple décrira leur apparence. L’utilisation d’une vidéo à haute vitesse est utilisée afin de comprendre les étapes de la formation de chacun de ces éléments.
Deux jeux de traces de sang sont générés à partir d’un substrat composé de sang porcin,traité avec un coagulant, puis déposés sur un support en carton.
Création par étapes de l’Atlas : un regard neuf
8 étudiants en sciences forensiques de l’Université d’Auckland, avec des compétences scientifiques et de morpho-analyse de base, constituent le pôle de participants non spécialistes.
Ils apportent un regard neuf sur la terminologie existante et sont à même de se détacher du jargon utilisé dans cette discipline : par conséquent, leur contribution ne peut être faussée par les méthodologies actuelles.
- Etape 1 : Dessin à main levée des éléments observables qui composent la trace de sang.
- Etape 2 : Choix de descripteurs parmi une liste de mots issus d’une classification préliminaire assortis d’une image de l’élément à décrire.

- Etape 3 : Choix de termes issus du langage courant pour décrire trois éléments de types différents.
L’objectif de cet atelier est de classifier les éléments à l’aide de descripteurs qui placeront les éléments dans des groupes significatifs.
- Etape 4 : Choix du groupe le plus approprié pour différents éléments ; des photographies ainsi qu’une classification préliminaire sont fournis.

Classification préliminaire des éléments
A l’issu de ces différents ateliers, la classification préliminaire de l’Atlas est alors revue et modifiée, donnant naissance à une aide visuelle appelée « Atlas des Eléments ».
Ce document consiste en des descriptions corrigées des groupes d’éléments assorties de photographies caractérisant chaque groupe.
Ce n’est qu’à cette étape que les principes de dynamique des fluides sont pris en compte : la formation des traces de sang est étudiée.
Ainsi, on a pu constater que les éléments d’un même groupe connaissent généralement une évolution similaire quant à leur formation.

Validation de l’Atlas par un groupe d’experts
Puis, un groupe de 17 experts en morpho-analyse ont pour tâche de classer les éléments dans les groupes conçus par l’Atlas, à l’aide de photographies représentant les différents éléments. 15 motifs de traces leur ont été fournis : 11 traces projetées, et 4 passives.
86% des traces ont été correctement répertoriées et classées. Les 14% restants correspondent à des traces d’apparences plus variables : elles restent difficiles à décrire sans ambiguïté.
Enfin, une cartographie des traces a été réalisée par associations entre les éléments appartenant au même groupe, mais appartenant également à des groupes différents.


Il est aisé d’entrevoir l’application de ce procédé sur terrain …

Un pas vers l’automatisation de la morpho-analyse
Si les experts en morpho-analyse des traces de sang ont pu déterminer avec fiabilité le mécanisme de formation des traces, cet Atlas peut néanmoins leur être d’une aide précieuse. L’examen isolé de chaque élément permet de constater que certains de ces éléments ne sont présents que dans certains types de traces.
L’étude des associations inter et intra éléments peut former la base d’un Atlas d’un genre nouveau et universel.
Il serait utile de procéder à ce type d’expérience sur d’autres supports que celui utilisé dans cette étude. Cette expérience n’en est qu’à ses débuts, certes prometteurs : l’utilisation de supports variés, ayant des degrés de rugosité ou d’élasticité différents, devront être testés. Cette classification ne demande qu’à être enrichie.
L’automatisation de la reconnaissance des traces de sang pourrait alors être envisagée, à l’instar des analyses balistiques, ou encore des analyses de marques d’outils.
Pour en savoir plus sur la morphoanalyse des traces de sang … : « Les sciences judiciaires pour aider les enquêtes criminelles : la morphoanalyse et l’autopsie »