SELS DE BAIN ET PSYCHOSE AIGÜE
SELS DE BAIN ET PSYCHOSE AIGÜE

SELS DE BAIN ET PSYCHOSE AIGÜE

Les sels de bains comptent parmi les nouvelles drogues de synthèse qui ont des effets stimulants sur le système nerveux. Un homme âgé d’une trentaine d’années a été hospitalisé quelques heures après s’être injecté des sels bains : il se plaignait d’entendre des voix.

Composition et effets des sels de bains

Les sels de bain se présentent sous forme de poudre blanche ou brune.
Les sels de bain se présentent sous forme de poudre blanche ou brune.

Les sels de bains, sont constitués de composés chimiques synthétiques de MDPV, qui est un stimulant du système nerveux central et qui imite les effets combinés de la cocaïne, du LSD et de l’ecstasy. Ils se présentent sous forme de poudre blanche ou brune. La structure du MDPV est proche de celles de la métamphétamine, de la methylenedioxyméthamphétamine (MDMA) , de la cathinone (alcaloïde issu du khat) 1.

MDPV
MDPV

 

 

 

Methamphetamine
Methamphetamine
MDMA : Methylenedioxymethamphetamine
MDMA : Methylenedioxymethamphetamine

 

Cathinone
Cathinone

Venant à l’origine de l’Inde et de la Chine, les sels de bains ont été introduits  tout d’abord  sur le marché britannique,  allemand, puis américain. On peut les acheter dans les supérettes, ou sur internet, toujours sous des noms enchanteurs (Ivory Wave, Vanilla Sky, Blue Silk, Red Dove, Cloud Nine, Lunar Wave, Ocean Snow Silk, …) ou évocateurs de leurs effets (White Rush, White Lightning, Hurricane Charlie, …). Etiquetés « impropre à la consommation », les sels de bains s’injectent, se sniffent, se fument, s’ingèrent accompagné de boisson ou de nourriture. Un sachet d’une cinquantaine de grammes se vend entre 10 et 25$.

Cette drogue a connu un véritable essor depuis 2010 : l’American Association of Poison Control Center a publié un rapport révélant qu’en 2011 le Centre a reçu 4137 appels liés à la toxicité des sels de bains contre seulement 302 en 2010, (+73%). Hautement addictifs, ils suscitent une très grande dépendance et un état de manque intense. Les effets cliniques sont multiples, tant neurologiques et comportementaux que cardiovasculaires. On signale des syncopes, une agitation sévère, des douleurs thoraciques, de la tachycardie, de l’hypertension, des phénomènes de diaphorèse, des mouvements du visage incontrôlés, une vision troublée, une certaine confusion, des hallucinations, des idées suicidaires qui peuvent même perdurer au-delà des effets stimulants.D’autres types d’effets ont également été rapportés au Centre : un fort sentiment d’empathie, une stimulation intense, une euphorie et  les sens exacerbés.

 

Etude de cas de psychose aigüe sous sels de bain

Paranoïa et surexcitation

Un homme de race blanche, âgé de 30 ans, fut conduit  à Saint Louis University Hospital   (l’Hôpital Universitaire de Saint Louis), par la police à la paranoiademande de sa petite amie car ce dernier proférait des menaces de suicide en s’appliquant un couteau sur la gorge.

Il se plaignait d’entendre des voix, et restait persuadé que les autres essayaient de le voler. Il décrivit la voix dans sa tête comme étant profonde et masculine. Elle lui ordonnait de tuer quelques un de ses voisins. Lors de l’entretien médical préliminaire, il admit que ses voisins étaient « ses compagnons de drogue ». Il nia  tout en bloc : il ne souffrait d’aucune vision, sa petite amie était absente de la maison, et il n’avait jamais menacé de suicider, ni esquissé un geste quelconque dans ce but. Il expliqua ensuite que sa compagne avait utilisé le prétexte de tentative de suicide pour le faire admettre à l’hôpital et le faire soigner pour sa psychose.

Cet homme déclara s’être injecté lui-même des sels de bains mélangés à de l’eau 3 à 4 jours avant. Il décrivit les effets de l’intraveineuse comme étant similaire à une injection de cocaïne, seulement  avec des effets quatre fois plus puissants.  Après une phase d’exaltation euphorique et d’hyperactivité, accompagnée d’un besoin décroissant de sommeil et d’appétit, phase qui dura 3  jours,  il commença à souffrir de délire paranoïaque, étant persuadé que ses voisins étaient postés derrière sa porte, occupés à l’épier. Il admit nourrir des envies de meurtre à l’encontre de ces derniers, car il se sentait menacé mais qualifia son humeur bonne, et déclara ne souffrir d’aucune façon de dépression ni d’état végétatif.

Un passé psychiatrique trouble

Lors d’un premier entretien psychiatrique, il déclara avoir été diagnostiqué  en 2003 comme souffrant de troubles affectifs bipolaires et de schizophrénie. Cependant, la première fois qu’il entendit des voix remontait à trois mois. Le patient reconnut faire preuve d’expansivité, connaitre des problèmes de sommeil, expérimenter un regain d’énergie, et pourtant n’avait  aucun passé de manque de concentration, de mégalomanie,  ni de pensées qui défilent. N’ayant pas eu de période durable  de sobriété, il était difficile de poser un diagnostic de troubles affectifs bipolaires.

Cet homme avait été hospitalisé plus d’une soixantaine de fois, principalement pour avoir eu des idées suicidaires et souffrir de psychose, dû à une consommation de substances.

Niant toute tentative de suicide par le passé, il a été victime de trois overdoses d’ecstasy et d’héroïne à 19, 28 et 29 ans. Il suivait un traitement médicamenteux  quotidien de 1000mg d’acide valproïque   chaque soir. Toutefois, il avait arrêté toute prise de médicaments trois mois avant d’être admis au Saint Louis University Hospital.

Antécédents  de toxicomanie

Le patient avait un long passé en tant que toxicomane. Il avait consommé au long des années de multiples substances : héroïne, cannabinoïdes, injection sels de bainalprazolam, LSD et méthamphétamines. Une semaine avant l’injection de sels de bains, il avait ingéré deux pilules d’héroïne. Sa première consommation de sels de bain remontait à 3 ou 4 mois, correspondant à l’apparition de sa psychose.

Historique

L’histoire du patient, alors âgé de 7 ans,  a été marquée par une histoire d’abus sexuel perpétré par son professeur en deuxième année de primaire. Cette même année, ses parents divorcèrent. Après avoir fait un bref passage de trois mois dans l’armée, il suivit une année en université.

Il a connu quelques ennuis avec la justice pour possession d’ecstasy et auprès du Tribunal de la circulation.

Au chômage depuis deux ans, non marié, mais père d’une petite fille de 3 ans, il vivait avec sa mère.

Un de ses cousins est atteint de troubles bipolaires affectifs et un autre cousin de schizophrénie.

Aucune autre information n’a pu être obtenue auprès de sa mère ou de sa petite amie.

Diagnostic et explications

health care concept with a medical bookSinon des traces observées sur ses avant-bras, assorties de démangeaisons intenses,  une tachycardie et une hypertension, aucune autre observation médicale particulière n’a été relevée.

La caractéristique première retenue lors de l’admission aux urgences de ce patient a été une psychose aigüe.

Le diagnostic différentiel pour des désordres  tels que des hallucinations auditives et visuelles serait :

  • un délire paranoïaque
  • une schizophrénie
  • un trouble schizophréniforme (la personne présente alors des symptômes psychotiques qui durent moins de six mois.)
  • un trouble schizo-affectif
  • un trouble psychotique bref
  • un trouble psychotique trouvant son origine à une problème de santé général
  • un trouble psychotique induit par une consommation de drogue.

Le passé psychiatrique du patient justifie son état paranoïde. Cependant, l’enchaînement temporel des symptômes est essentiel à l’étude de ce cas.

En effet, l’apparition de sa psychose, soit 4 mois avant son admission aux urgences, concorde avec le début de sa consommation de sels de bain.

Tous les symptômes qu’il a lui-même décrit comme les hallucinations auditives, la paranoïa, l’hyperactivité, le besoin de sommeil décroissant, et qu’il a éprouvé quelques heures après l’injection de drogue, ont été préalablement associés dans la littérature médicale à la consommation de sels de bain.

Les allégations rapportées d’idées suicidaires sont incertaines dans son cas.

Il est important de souligner que la psychose aigüe provoquée par cette intraveineuse s’est atténuée au bout de quelques heures, sans aucune médication, et n’est pas réapparue pendant quelques jours. Une psychose induite par l’utilisation de sels de bain  peut durer de quelques heures à quatre semaines.

Pendant ses trois jours d’hospitalisation, durant lesquels lui ont été administrés 250 mg  d’acide valproïque (deux fois par jour) et 100 mg de tramzodone (pour lui permettre de dormir la nuit), le patient ne s’est plaint d’aucune hallucination visuelle ou auditive, il n’a eu aucun comportement désorganisé ou répondant à un stimulus interne. Son processus de pensée est devenu logique, aussi a-t-il pu rentrer à son domicile.

 

Un voyage pour l’enfer à prix défiant toute concurrence

Les symptômes et ressentis suite à une consommation de sels de bains sont décrits sur des sites underground 2 :

Je me sentais dans un état épouvantable. Je croyais que la police du campus était derrière ma porte et voulait m’arrêter. Je pensais que mes amis et ma famille complotaient contre moi. J’entendais des sirènes et des cornes de brume en permanence. J’entendais la voix de mes amis qui ne disaient que du mal de moi. Je croyais que mes cheveux tombaient et que j’étais recouvert d’insectes. L’enfer : j’étais en enfer.

hell

Par la suite, ce toxicomane a développé une insuffisance rénale qui exige un traitement lourd à long terme, et  souffre d’une tachycardie permanente.

Cela a réduit mon anxiété sociale (…) je suis devenu insomniaque (…) ça m’a enlevé toute faim et toute soif.

Je me sentais vraiment bien. En moins de deux jours, j’ai commencé à voir des gens par ma fenêtre, principalement des policiers. Il y avait des flics partout (..) puis une équipe d’intervention est venue la nuit et ils ont braqué leurs pistolets sur ma tête. J’ai commencé à perdre l’équilibre et à avoir des trous de mémoire.

Ces drogues connaissent un véritable essor dû à leur bas prix. Les conséquences tant physiologiques que neurologiques sont effrayantes. Il est grand temps d’envisager des régulations et restrictions à l’échelle mondiale.

  1. Voir aussi : « Les Sels de Bain sont à la mode » .
  2. http://erowid.org/experiences.

Post source : Acide valproïque - Wikipédia. (s. d.). Consulté février 11, 2013, à l’adresse http://fr.wikipedia.org/wiki/Acide_valpro%C3%AFque Diagnostic différentiel : Définition - Vulgaris Médical. (s. d.). Consulté février 11, 2013, à l’adresse http://www.vulgaris-medical.com/encyclopedie-medicale/diagnostic-differentiel EMCDDA | Les cathinones de synthèse. (s. d.). Consulté février 12, 2013, à l’adresse http://www.emcdda.europa.eu/publications/drug-profiles/synthetic-cathinones/fr Quétiapine - Wikipédia. (s. d.). Consulté février 11, 2013, à l’adresse http://fr.wikipedia.org/wiki/Qu%C3%A9tiapine Stoica M.D.*, Mihaela V., & Felthous M.D., A. R. (2013). Acute Psychosis Induced by Bath Salts: A Case Report with Clinical and Forensic Implications. Journal of Forensic Sciences. doi:10.1111/1556-4029.12038 Crédits Photos : 11-212BathSaltsPROOFED-1.jpg (Image JPEG, 500x500 pixels) - Redimensionnée (97%). (s. d.). Consulté à l’adresse http://www.newswise.com/images/uploads/2011/08/22/11-212BathSaltsPROOFED-1.jpg 1345676078842.jpg (Image JPEG, 250x150 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://cen.acs.org/content/cen/articles/90/i35/US-Criminalizes-Designer-Drugs/_jcr_content/articlebody/subpar/articlemedia_5.img.jpg/1345676078842.jpg att_116122_EN_Figure-1-Cathinone.gif (Image GIF, 295x194 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://www.emcdda.europa.eu/attachements.cfm/att_116122_EN_Figure-1-Cathinone.gif att_116134_EN_Figure-6-MDPV.gif (Image GIF, 472x250 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://www.emcdda.europa.eu/attachements.cfm/att_116134_EN_Figure-6-MDPV.gif brain 2.jpg (Image JPEG, 375x366 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://www.kickoff.net.au/images/brain%202.jpg DRR02490.JPG (Image JPEG, 288x216 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse https://healthy.kaiserpermanente.org/static/drugency/images/DRR02490.JPG heroin_detox.jpg (Image JPEG, 430x238 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://www.addictionsearch.com/_media/addictionsearch/stock/430_238/heroin_detox.jpg lepoint_3oct2011_amphets_maquillees_en_sel_de_bain.jpg (Image JPEG, 652x284 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://droguesblog.files.wordpress.com/2011/10/lepoint_3oct2011_amphets_maquillees_en_sel_de_bain.jpg methamphetamine.gif (Image GIF, 361x124 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://www.emcdda.europa.eu/imglib/Drugprofiles/methamphetamine.gif methylenedioxymethamphetami.gif (Image GIF, 446x133 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://www.emcdda.europa.eu/imglib/Drugprofiles/methylenedioxymethamphetami.gif paranoia.preview.jpg (Image JPEG, 640x446 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://undergrowth.org/system/files/images/paranoia.preview.jpg Treatment.jpg (Image JPEG, 240x159 pixels). (s. d.). Consulté à l’adresse http://www.projectknow.com/wp-content/uploads/Treatment.jpg two_steps_from_hell_by_okatori-d3d5ui0.png (Image PNG, 1280x1024 pixels) - Redimensionnée (47%). (s. d.). Consulté à l’adresse http://muslimdebateinitiative.files.wordpress.com/2012/06/two_steps_from_hell_by_okatori-d3d5ui0.png

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