Psychiatrie Légale et Vampirisme
Il n’existe aucune nosographie du vampirisme clinique dans le Manuel Diagnostique et Statistique (DSM). Considéré comme une pathologie associée à un délire schizophrénique, une paraphilie ou à la psychopathie, le vampirisme n’est pas une pathologie psychiatrique à part entière, juste un symptôme, contrairement à ce que soutient Richard Noll, qui l’a nommée « syndrome de Renfield ».
Chronique d’une schizophrénie annoncée
Un trouble délirant se caractérise par des symptômes psychotiques, assortis de fausses croyances (délire). Une idée délirante est par essence un symptôme dont le sujet n’a pas conscience. Il s’agit d’une croyance en opposition avec la réalité et à laquelle le sujet attache une conviction absolue. Il est dans l’incapacité de remettre en question sa croyance délirante. Le vampirisme clinique s’accompagne parfois d’auto-mutilation, et d’hétéro-agressivité. Il n’est alors qu’une composante d’une pathologie plus sévère tel qu’un délire psychotique, et sera alors un signe précurseur soit d’une schizophrénie au stade initial, soit d’une schizophrénie avérée.
La schizophrénie est une psychose chronique qui s’accompagne d’un syndrome hallucinatoire et d’idées délirantes mal systématisées. Le schizophrène cesse de communiquer avec le monde extérieur pour se perdre dans un monde autistique et délirant. Elle touche 1% de la population mondiale, et particulièrement les 15-35 ans. Le sujet schizophrène peut alors éprouver une soif de sang sans que cela se rattache d’une quelconque façon au mythe vampirique.
Richard Trenton CHASE (1950-1980), alias le « Vampire de Sacramento » en est la parfaite illustration. Son délire s’appuyait sur la croyance que son sang était empoisonné et qu’il fallait donc le purifier. Il était convaincu que les nazis cherchaient à transformer son sang en poudre. Il alla même jusqu’à s’injecter du sang de lapin dans les veines. Son délire de purification l’amena à boire le sang d’oiseaux, puis à tuer 6 personnes.
Les personnalités limites ((borderline) ou souffrant de troubles délirants (sans être schizophrène) peuvent également souffrir de ce symptôme. 2%à 3% de la population mondiale souffre d’un trouble de la personnalité limite. Tout comme le schizophrène, il montre une grande labilité émotionnelle, et souffre de délire psychotique. Impulsif, instable, intolérant à la frustration, et suicidaire, la personnalité limite peut néanmoins passer à l’acte et connaître des impulsions hétéro agressives. Son monde est en noir et blanc : tout ou rien. C’est lors d’épisodes psychotiques que le sujet peut passer à l’acte.
Contrairement au schizophrène, le sujet souffrant de bouffées délirantes garde une lucidité apparemment entière. Il reste en relation avec le monde extérieur, et bien que le champ de la conscience soit altéré, la notion d’espace-temps est intacte. L’imaginaire prend le pas sur la réalité avec une prédominance du délire. Le sujet évoluera vers une schizophrénie avérée s’il y a systématisation du délire avec un automatisme mental important, des signes de discordance et l’existence d’une personnalité prémorbide de type schizoïde.
Paraphilie deviendra syndrome
En réalité, le vampirisme clinique couvre de nombreuses pathologies, allant de la nécrophagie, en passant par le cannibalisme et la nécrophilie. Il désigne bien sûr la pratique de boire le sang des autres, ou son propre sang (auto-vampirisme). Il s’agit d’une paraphilie selon laquelle le sujet retire un plaisir d’ordre sexuel en buvant du sang humain. Le sang prendra souvent une valeur mystique, surnaturelle, et deviendra synonyme de vie, d’énergie, de jeunesse, de pouvoir. Cette compulsion irrésistible sera souvent associée à une pratique sexuelle forte.
Richard NOLL, professeur de psychologie à la De Sales University, Pennsylvanie, Etats-Unis, s’est inspiré des travaux d’ Herschel PRINS sur le vampirisme clinique et propose dans son livre « Vampires, Werewolves & Demons » une nosographie d’un syndrome qu’il nommera « syndrome de Renfield». Il convient, néanmoins de ne pas confondre vampirisme clinique et syndrome de Renfield. Le vampirisme clinique est exempt de toute connotation sexuelle.
Le syndrome de Renfield est une constellation de symptômes cliniques, qui se décline quatre phases évolutives :
1- Auto-vampirisme : L’enfant se coupe ou se blesse accidentellement et découvre un plaisir dans l’ingestion de son propre sang.
2- Auto-vampirisme – Automutilation : Ultérieurement, l’enfant ou l’adolescent pourra apprendre à s’ouvrir des vaisseaux plus importants (artères, veines) afin de disposer d’un afflux de sang plus important. Cette pratique s’accompagne souvent de masturbation à l’adolescence.
3- Zoophagie : le sujet attrapera et mangera ou boira le sang d’animaux (insectes, oiseaux, chat, chien …). L’agressivité grandit et mène généralement à la quatrième phase.
4- Vampirisme : le sujet ne vit que pour boire du sang humain. Il pourra voler ce sang dans des hôpitaux, des laboratoires ou si cette pratique sexuelle n’est pas consentie, tuer.
Peter KÜRTEN (1883-1931), alias le « vampire de Düsseldorf », est l’exemple type du sujet atteint du syndrome de Renfield. KÜRTEN montrait également de fortes tendances psychopathiques. Ce type de crime sera classé dans les meurtres de convoitise (lust murders). Chez ce type de tueur, la souffrance de l’autre est primordiale, aussi ce type de meurtres sera assimilé au sadisme sexuel. L’objet de la paraphilie (fétichisme) est le sang. Alors qu’il se savait condamné à la guillotine, KÜRTEN demanda au médecin si une fois décapité, son ouïe et son cerveau fonctionneraient encore quelques secondes afin de pouvoir entendre son propre sang gicler. Le médecin répondit par l’affirmative, alors KÜRTEN déclara : « Ce sera le plaisir qui mettra fin à tous les plaisirs ».
Si le passage est quasi certain entre les phases 3 et 4, il n’en va pas de même pour les deux premières phases. L’auto-vampirisme enfantin ne mène pas nécessairement à la phase d’auto-mutilation.
Le syndrome de Renfield exclut toute autre paraphilie, telle que la nécrophagie, ou nécrophilie. L’objet de cette paraphilie (en l’occurrence le fétichisme) est le sang. Le but unique et ultime étant l’obligation de boire du sang.
Plus un seul humain sur terre
Loin de l’image galvaudée du monstre hideux aux griffes et aux crocs acérés, le vampire d’aujourd’hui est élégant, raffiné, aristocratique et sensuel. Ce mythe, car il ne s’agit que d’un mythe, est encore une source inextinguible de fantasmes, nourrissant l’imaginaire. Et pour ceux qui continuent de croire obstinément à ce mythe, voici une démonstration mathématique qui devrait les faire réfléchir. Le Professeur EFTHIMIOU, de la University of Center California, publie une étude prouvant que les vampires n’existent pas. Son calcul se base sur la population mondiale en 1600, qui était de 536 870 911 personnes. En prenant comme postulat de départ , que le premier vampire, « né » au 1er janvier de cette année-là, mord une seule personne par mois : au mois de février, il y aurait alors 2 vampires, en mars 4, en avril 6, etc …
En prenant en compte le taux de mortalité de l’époque, l’extinction humaine eut été encore plus rapide, malgré une natalité explosive.