Story Highlights
- Un traité qui ne compte pas pour des Prüm…
- Un FNAEG boulimique
- Locus et bouche cousue
- Non Codant ou Codant, non ?
ADN NON CODANT DECODE
Des segments ADN Non Codant ont été rajoutés à la liste de ceux déjà prélevés pour le FNAEG… non codant, vraiment ?
Entrée en vigueur le 22 Août 2015 d’une nouvelle version consolidée de l’Arrêté, voté le 10 Août dernier, modifiant Article A38 du CPP.
Un traité qui ne compte pas pour des Prüm…
Afin d’améliorer l’échange d’informations entre les différents pays de l’Union Européenne dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, la criminalité transfrontalière et la migration illégale, un traité a été signé le 27 mai 2005 : le traité de Prüm.
Ce traité fixe l’accès automatisé aux profils ADN, aux empreintes digitales, et aux données relatives aux véhicules et à leurs détenteurs des pays signataires.
Dans un souci de conformité et de compatibilité intra-communautaire, l’adoption de standards européens est de mise. Ainsi, la structure des bases de données doit être uniforme et l’ordre de présentation des segments ADN doit être le même que celui fourni par les séquenceurs utilisés par tous les laboratoires. De la même façon, le nombre de segments prélevés doit tendre vers cette uniformité et tant qu’à faire se soumettre le plus possible aux standards internationaux.
Un FNAEG boulimique
Or, plus on fait de prélèvements sur une population, plus les prélèvements doivent être discriminants afin de réduire le risque de correspondance fortuit.
- en 1998 : 7 segments
- en 2006 : 16 à 18 segments
- en 2015 (applicable à partir de 2018) : 26 segments
Certains loci ont été purement et simplement rajoutés tandis que d’autres, jusqu’alors optionnels sont devenus obligatoires.
C’est le cas du D2S1338, qui était au choix hier mais qui rentre dans la liste des loci à prélever obligatoirement.
Locus et bouche cousue
La constitutionnalité du FNAEG se mesure à des principes clairement énoncés et validés en 2010 par le Conseil Constitutionnel : il ne doit en aucun cas
porter atteinte au cœur de la personnalité de l’individu
en divulguant
des informations sur le caractère, l’héritage génétique ou les maladies.
C’est pour cette raison que les segments ADN choisis doivent être uniquement du génome non codant.
Seul le gène de l’amélogénine, marqueur spécifique du sexe, est autorisé.
Aucun segment prélevé ne doit révéler des caractères apparents comme des traits physiques, la taille ou une quelconque prédisposition à une maladie.
Le FNAEG ne doit être utilisé exclusivement pour identifier une personne en la distinguant de toutes les autres par discrimination.
Non Codant ou Codant, non ?
Or, les connaissances en biologie moléculaire aujourd’hui ne sont pas celles d’il y a 30 ans.
Si un ADN peut être reconnu comme étant non codant au sens biologique du terme, il n’en reste pas moins révélateur d’informations tant pathologiques que morphologiques.
Revenons à notre D2S1388 : une étude du TIGEM , publiée par le Professeur Paolo GASPARINI le 6 octobre 2004 dans journal de la société Européenne de Génétique Humain, révèle que ce marqueur est déterminant dans la transmission d’une maladie génétique héréditaire rare : la pseudokaliémie.
Le locus D18S51 est, quant à lui, impliqué dans certaines formes de lymphomes.
Que dire de l’étude 1 publiée le 23 juin par Liu HUI de l’Université de Dalian ,qui démontre l’association de segment ADN D21S11-28.2 aux maladies coronariennes ?
Ces loci, pourtant biologiquement « non codant » renferment plus d’informations que prévu et la nature de ces informations est contradictoire avec le précepte de non divulgation de renseignements pathologiques.
Suite à une étude publiée dans l’International Journal of Legal Medecine, un programme a été mis en ligne par une équipe de chercheurs de Porto : PopAffiliator.
Il permet, en n’utilisant que 17 des loci prélevés pour le FNAEG, de déterminer l’appartenance d’un individu aux groupes principaux de population : Afrique Sub-Sharienne, Eurasie, Asie de l’Est, Afrique du Nord, Proche Orient, Amérique du Nord, Amérique du Sud, Amérique Centrale.
L’ensemble des segments ADN Non Codant analysés conjointement sont donc potentiellement informatifs et peuvent donc apporter des informations sur l’origine ethnique ou géographique des individus.
Comme le clamait un rapport présenté en juin 2001 devant l’Assemblée Nationale, les analyses ADN destinées au FNAEG
ne peuvent donc fournir aucune indication sur un éventuel trait génétique étranger à l’objectif visé (origine ethnique, maladies ou prédispositions pathologiques).
Or, à cette époque seulement 7 loci étaient requis. Aujourd’hui, 18, et demain 26…
Les infractions donnant lieu à une inscription au FNAEG sont multiples et seuls les délits financiers en sont exempts.
Au 1 septembre 2013, le FNAEG contenait les profils génétiques de 2 547 499 individus dont :
- 1 911 675 personnes mises en causes
- 430 298 personnes condamnées
- 149 097 traces non identifiées
En 2014 : 2 655 381 profils génétiques ont été chargés dans la base.
La mutualisation internationale des ressources ADN est louable, mais jusqu’à quel point l’ADN non codant verrouille-t-il efficacement une utilisation détournée de ces données ?
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Novel association analysis between 9 short tandem repeat loci polymorphisms and coronary heart disease based on a cross-validation design
Hui, Liu et al.
Atherosclerosis , Volume 218 , Issue 1 , 151 – 155
Popaffilitor : http://cracs.fc.up.pt/popaffiliator/
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